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AGRICULTURE Le contexte national s'invite à l'Assemblée de Corse




Deux questions orales

AGRICULTURE Le contexte national s'invite à l'Assemblée de Corse
Aux questions posées par Antoine Poli pour le groupe Un soffiu novu et Marie-Claude Branca pour le groupe Core in Fronte, voici la réponse apportée par le Président Livrelli :

« A ringrazià vi Madama Presidente.
Mesdames et messieurs les conseillers ;
Personne ne peut douter du soutien de la Collectivité de Corse, de ses élus et notamment du Président du Conseil Exécutif et de moi-même, en tant que président de l’ODARC mais avant tout en tant qu’agriculteur, éleveur, engagé dans la défense du monde agricole depuis de nombreuses années !
Ce soutien, le président de l’Exécutif l’a réaffirmé vendredi dernier lors d’une réunion de Régions de France dédiée à la crise agricole. Il a également rappelé combien les spécificités de la Corse (insularité, petites exploitations, problématique foncière, etc) amplifiaient encore les difficultés pour nos agriculteurs et ce, afin que celles-ci soient relayées auprès du Premier Ministre par Carole Delga, Présidente de Région de France.
Ce soutien, je l’ai réaffirmé aux agriculteurs qui sont venus à l’ODARC vendredi. Lors de cette rencontre, à laquelle a également assisté le Président de l’Office Hydraulique, plusieurs préoccupations ont été soulevées et même si elles relèvent principalement de l’échelon de l’Etat, j’ai réitéré la position de la CdC d’être aux côtés du monde agricole pour porter ces revendications.
Par exemple, la problématique des règles en matière environnementale. En effet, bien que respectueux de l’environnement et conscient des enjeux, certaines transpositions des normes sont si contraignantes voire absurdes, qu’elles deviennent un frein au développement de l’agriculture et particulièrement en Corse. J’en veux pour exemple les règles en matières de défrichement ou pire, celles en lien avec la tortue d’Hermann qui obligeraient à laisser des passages, des trous, dans les clôtures pour faciliter leurs déplacements, alors que cela n’est pas inscrit réglementairement, mais pourtant proposé par les services déconcentrés. J’ai personnellement abordé ce sujet avec le Préfet de Corse en novembre dernier lui demandant de s’assurer de la lecture et de l’application de ces règles auprès de ses services.
Nous avons abordé également la problématique des importations et ce, à deux niveaux. Tout d’abord, celui de la concurrence déloyale de produits qui ne respectent pas les règles imposées à nos producteurs. Mais également, celui des productions extérieures qui bénéficient de la DSP pour entrer en Corse et qui viennent concurrencer les productions locales. Il est, comme vous le savez, impossible d’interdire l’arrivée de ces produits au nom de la libre circulation des biens ; par contre, il est nécessaire de réétudier la possibilité que la DSP ne s’applique pas sur certains produits dès lors que l’offre en local couvre le besoin. Pour cela, il faut négocier une dérogation avec la Commission Européenne afin qu’elle accepte cette différenciation.
Lors de la rencontre de vendredi, la question de la réévaluation de l’ICHN a également été sur la table. Là encore, j’ai rappelé que l’ODARC avait demandé à l’Etat cette réévaluation dès la préparation du PSN en 2021 car, pour se mettre au niveau des autres régions. Au-delà des crédits européens qui seraient nécessaires pour augmenter l’enveloppe et donc qu’il faudrait enlever sur d’autres mesures du PSN, c’est également l’augmentation de l’enveloppe Etat, qui vient en contrepartie nationale, qui pose problème. Nous avons donc demandé lors d’une rencontre avec le cabinet du Ministre en décembre, une analyse comparative précise notamment sur les montants versés en élevage en zone de montagne et de haute-montagne. 
La problématique foncière enfin, avec la nécessité absolue de relancer la commission d’aménagement foncier de Corse dans les plus brefs délais afin d’agir conformément aux dispositions du Code Rural sur l’aménagement foncier agricole et forestier (AFAF), sur les échanges et cessions amiables d’immeubles ruraux, sur la mise en valeur des terres incultes et sur la règlementation et la protection des boisements. De plus, dans le cadre du processus d’autonomie, j’ai sollicité tous les syndicats agricoles, les chambres d’Agriculture mais également les groupes de l’Assemblée afin qu’ils fassent remonter des propositions à l’ODARC notamment sur le foncier. De notre côté, nous avons déjà ciblé des nécessaires évolutions fiscales et réglementaires qui nous permettront de mobiliser les terres en friche, de rénover le cadastre, de faire évoluer la notion de forêt à vocation agricole et des conditions de pacage en forêt, de modifier des points du code rural relatifs au défrichement agricole, etc.
Enfin, les agriculteurs présents ont sollicité un rendez-vous solennel, ici, dans notre Assemblée, afin de pouvoir s’exprimer devant tous les conseillers et s’assurer de leur soutien.
En ce qui concerne la complexité administrative, le « carcan » comme vous l’appelez monsieur le Conseiller, celui-ci est inhérent à la mobilisation de crédits publics et encore plus lorsqu’il s’agit de crédits européens. Il n’est spécifique ni à la CdC ni à l’ODARC ni à la Corse. Sachez au contraire, qu’à la différence de ce qu’il se passe sur le continent où l’agriculteur monte tout seul son dossier d’aide ou paye un prestataire pour le faire, l’ODARC essaie de les accompagner au mieux en les aidant jusqu’à remplir les formulaires de demande d’aide publique. Sachez également que l’ODARC applique strictement le pourcentage de 5% de contrôles réglementaires notamment en ce qui concerne l’ICHN. On ne fait pas plus, mais on ne peut pas faire moins que ce que nous oblige les règlements.
En effet, l’ODARC en tant qu’Organisme Payeur est lui-même contrôlé par la Commission de Certification des Comptes des Organismes Payeurs, chaque année, et toute erreur constatée entraine au minimum le remboursement de l’aide pour le bénéficiaire, parfois des pénalités financières pour la CdC et peut aller jusqu’au retrait de l’agrément d’Organisme Payeur de l’ODARC. Les paiements se feraient alors par l’ASP et, au regard des retours des agriculteurs du continent, à savoir des délais de paiement pouvant aller jusqu’à 18 mois pour les aides à l’installation des jeunes agriculteurs, je ne pense pas que cela soit une voie à emprunter. De plus, dans le cadre du processus d’autonomie, il ne s’agirait pas de perdre une compétence unique en France car, je le rappelle l’ODARC est le seul organisme payeur à l’échelon régional et il se situe au même niveau que l’ASP dans le cadre des échanges avec la Commission européenne.
Quant au projet que nous portons pour l’agriculture corse et qui nécessite d’orienter le développement agricole vers plus d’autonomie alimentaire, je vous confirme qu’il est courageux car il requiert de faire des choix, dans un environnement réglementaire contraint et un contexte budgétaire difficile.
Oui, il est ambitieux car il nécessite que des transitions soient opérées pour réduire la dépendance, sécuriser les exploitations existantes dans un contexte de changement climatique et installer de jeunes agriculteurs qui puissent vivre du fruit de leur travail.
Alors, oui, ce projet est en cours et avec les moyens qui sont les nôtres aujourd’hui. En effet, même si nous demandons à récupérer le 1er pilier de la PAC, ce n’est qu’avec le 2ème pilier que nous pouvons agir pour l’instant et nous agissons.
Ainsi, les principes qui ont conduit à définir les modalités d’accompagnement des investissements agricoles dans le cadre du volet Corse du PSN et notamment la détermination des taux d’aide ont pris en compte les orientations stratégiques en faveur de l’autonomie alimentaire, du soutien aux productions traditionnelles et de la conservation de l’environnement.
Par exemple :
  • En premier lieu : apporter un soutien majoré à la filière laitière (ovin/caprins) avec des taux d’interventions bonifiés, allant de 60% à 80% pour tous les investissements ;
  • En second lieu : soutenir pour tous les éleveurs les démarches de structuration des parcours avec des aides pour la réalisation de clôtures à taux fortement bonifiés (80%) ;
  • Accompagner la reconquête des surfaces agricoles inutilisées avec des taux d’aide à la mise en valeur majoré à 60% par rapport aux taux d’aide bâtiment (50%)/matériel (40%) ;
  • Améliorer l’autonomie fourragère des exploitations (poursuite de l’aide aux cultures protéiques) ;
  • Bonifier les jeunes agriculteurs (+10% à 20% dans la limite de 80%) et différencier les demandeurs agriculteurs à titre principal par rapport aux agriculteurs à titre secondaire qui exercent d’autres activités et disposent de revenus majoritairement non agricoles (-20%);
  • Promouvoir les investissements collectifs (taux bonifiés à 60/65%) ;
  • S’appuyer sur les signes de qualités (SIQO obligatoires pour certains secteurs comme l’agrumiculture, la viticulture, la castanéiculture, l’apiculture ou l’oléiculture) ;
  • Soutenir l’arboriculture traditionnelle par la rénovation au titre des opérations en faveur du maintien des paysages traditionnels et de la conservation de l’environnement (taux de 80% même pour les éleveurs porcins);
  • Soutenir les petites exploitations en maraichage, (taux de 80% pour les exploitations de moins de 3 ha).
 
Sur le plan opérationnel, il est également prévu de :
  • Rationaliser les investissements individuels en assurant le bon dimensionnement des matériels et des bâtiments ;
  • Simplifier les modalités de l’aide par l’utilisation de montants plafonds (€/m2) et de barèmes de coût (clôture, irrigation, mise en valeur) ne nécessitant plus plusieurs devis;
  • Mettre en œuvre des prescriptions permettant une meilleure maîtrise de l’irrigation (bonification pour matériels de pilotage et d’automatisation) ;
  • Accompagner les investissements en faveur de l’agroécologie (MAEC).
 
De plus, le volet Corse du PSN intègre également un dispositif qui nous permettra d’accompagner des projets de création et d’agrandissement des infrastructures hydrauliques. Nous y travaillons déjà avec le président de l’Office Hydraulique suite aux réunions que nous avons tenu ensemble sur les territoires.
Pour rappel, dans le cadre de la concertation pour la nouvelle programmation, ce sont plus de trente réunions qui se sont tenues depuis deux ans avec les acteurs du monde agricole, sans oublier les demandes de contributions écrites afin de préciser les échanges.
A ces rencontres, se rajoutent les séances du Conseil d’Administration et du bureau de l’ODARC, où le monde agricole est largement représenté et où sont systématiquement abordées les problématiques que rencontrent les agriculteurs, qu’elles soient conjoncturelles ou structurelles.
A chaque problème conjoncturel, comme la crise en Ukraine ou la fièvre catarrhale par exemple, l’ODARC était aux côtés des professionnels afin de trouver des solutions souvent à la place de l’Etat !
Encore plus récemment, dans le cadre du processus d’autonomie, j’ai demandé à tous les syndicats, aux chambres d’agriculture et même aux différents groupes de l’Assemblée de Corse, de me faire part de propositions sur 5 thématiques qui ont été validées au CA de l’ODARC, à savoir Foncier/fiscalité, Gouvernance, Sanitaire, Mise en marché/Transport et PAC 1er pilier/Financements.
Cependant, comme toute nouvelle programmation, la mise en œuvre nécessite des ajustements techniques, administratifs et réglementaires. Ce faisant, grâce à l’engagement financier de la CdC, nous avons pu poursuivre l’accompagnement des dossiers d’aide à l’investissement et à l’installation des jeunes agriculteurs durant toute l’année 2023. Cet effort financier significatif sans précédent de 11.5M€ uniquement en crédits de la CdC a permis de ne pas avoir de coupure et que les agriculteurs, notamment les jeunes agriculteurs, ne se retrouvent pas dans la situation du continent avec des ruptures dans les aides pour l’année 2023 !
Concernant le 1er pilier de la PAC et même si nous ne sommes pas l’autorité de gestion de ces aides, nous avons encore réitéré notre demande concernant une aide couplée à la production de céréales (NB : grains et à paille) à l’occasion de la révision annuelle du PSN.
Enfin, à l’initiative de l’ODARC, et en partenariat avec la Chambre d’agriculture de Haute-Corse une étude est en cours sur la création d’un marché d’intérêt territorial (MIT), un marché de gros sur le territoire au service du projet agricole de la Corse, pour une meilleure rencontre des productions et des consommateurs locaux, une meilleure gestion des flux de commerce hors territoire et une optimisation des coûts de revient. Cet outil pourrait également servir de levier au développement d’activités de transformation agroalimentaire et de barycentre de l’écosystème des acteurs du système alimentaire en Corse. L’objectif, d’ici cet été, est de définir les contours de ce MIT dans le cadre d’un travail de co-construction entre les collectivités et les acteurs des filières englobant tous les maillons de la chaine de production, distribution et transformation.
Si j’ai un regret, c’est bien que l’Etat, dans les relations que nous avons eues avec le Ministère n’ait pas été plus à l’écoute d’un certain nombre de sujets que nous avons initiés ou largement anticipé, lesquels constituent une grosse part des revendications des agriculteurs.
Comme vous le voyez, la majorité territoriale a une stratégie, une vision de ce que vers quoi l’agriculture corse doit tendre : une agriculture de production, respectueuse de l’environnement et garante d’une souveraineté alimentaire pour notre peuple.
Cette agriculture de production que tout le monde appelle désormais de ses vœux, cela fait vingt ans que je la prône, vingt ans que je la défends. Alors, ce projet d’une agriculture pour la Corse, je souhaite aujourd’hui le porter et le faire aboutir.
A cet égard et de toute évidence, c’est bien le projet d’Autonomie qui pourra nous apporter plus de maitrise, de réactivité et de responsabilité sur la politique agricole.
A ringrazià vi »
 
Rédigé le Lundi 5 Février 2024 à 17:08 | modifié le Lundi 5 Février 2024






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